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Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
18 novembre 2007

Le Voyage à la fin de la lumière

alakran_20014

Bonsoir très chère Angeline,

Tout d'abord, je vous présente mes excuses pour cette absence. En fait, après mon retour de Valencia, je suis reparti pour Prague pour encore une semaine. Je viens de rentrer à Paris et j'ai décidé de vous écrire ce petit mot en espérant qu'il vous trouvera dans un parfait humeur. Je ne sais pas si vous avez changé d'avis mais moi je tiens toujours à vous rencontrer.

J'attends votre proposition de rendez-vous avec impatience.

Veuillez recevez mon désir toujours contenu par mon respect.

Emile.

Vous pourriez me parler de Valencia, de Prague, de vos voyages. Mais vous souhaitez plus me parler de votre désir qui est de me rencontrer. Vous ne savez pas si j'ai changé d'avis, d'ailleurs je me demande si vous saviez quel était mon avis au départ. Vous craignez que votre message ne m'arrive alors que je sois de mauvaise humeur, ou préoccupée, ce qui pourrait expliquer mes précédents billets sur votre compte. Et la manière dont j'ai dépeint votre personnalité, à travers vos billets. Je vous avais donné, selon votre regard, une aura légère et sombre. Je vous avais interrogé à ce sujet d'ailleurs, en vous demandant si ce n'était pas vous qui aviez mal interprété ma réaction, chose que vous n'envisagiez pas : vous envisagiez de me présenter votre queue, à ma bouche, à mon visage. Ce qui est vraiment dommage. On pourrait parler de Prague, de Valencia. Vous devez en voir du monde, des parties du monde, pour une petite chose frêle et fragile qui reste à attendre une Amérique, comme disait l'autre. L'autre dans son hammam entouré de femmes. Ce n'est pas celui de la Mosquée, ce n'est pas celui où entre hommes, finalement, on s'arrange dans toutes les positions possibles, même pour prendre une tasse de thé. L'auriculaire relevé. Vous n'aimez peut-être pas qu'on vous résiste, et même professionnellement parlant. L'érotisme du voyage, c'est un érotisme, une chance, ou la vie. Le voyage forme la jeunesse, l'esprit, et l'esprit n'est pas saint, bien au contraire, mais d'accord avec moi. L'esprit me suit, je fuis, je cherche une Amérique, finalement il avait raison l'autre. Prague, Valencia, c'est certainement une chance, l'autre jour en Russie, à Moscou, qui brûle. Paris brûle-t-il ? Je ne sais pas. Je ne serai jamais parisienne j'avais dit un jour à Denis, et il m'avait répondu : mais bien sûr que si. Comme si j'étais capable, de le devenir, et pas que de le devenir : le vivre vraiment, pleinement. Paris donne sa chance aux artistes m'avait dit je ne sais plus quel connard qui publiait chez Gallimard et qui trouvait chez moi les germes d'une possible éventuelle hypothétique oeuvre importante, ses livres étaient intégralement et uniquement pour les pauvres intérieurs, pour ceux du microcosme, qui étaient copines avec l'Univers. Je dis ça mais attention : non pas que je sois extérieure Emile. Mes jambes, Emile, mes cuisses, je ne comprends pas comment vous avez pu penser que c'était de ma faute, si je prenais vos messages pour ce qu'ils étaient : sombre et légers. Je vous ai dit aussi, et vous n'avez pas entendu, qu'ils me faisaient l'effet de relire mon oncle. Mais comme vous devez trouver excitant un oncle qui se fait sucer par sa nièce, ou, à la limite, comme ça doit vous faire frissonner dans le bas du dos comme n'importe quelle vermine ordinaire et masculine, rien qu'à l'idée, de cet interdit fondamental de l'humanité, qui n'était pas de rigueur en Egypte auparavant, je suppose que vous n'avez pas entendu mon désarroi, et mes souvenirs, qui reviennent déjà assez comme ça, seuls, sans avoir besoin de haine, ou de considérations sexuelles de votre part, vous avez été aveuglé, vous n'avez pas écouté, ou alors seulement vous-même. C'est vrai je pourrais avoir beaucoup d'hommes, beaucoup de femmes, beaucoup de chiens, de dobermans, d'enfants, et de domestiques noirs dans ma cave, c'est vrai, j'ai tout l'argent du monde, comme le dit Francis qui le sait, pour aller voyager en Amérique. Le Voyage est nécessaire. Maladroit à la fin de la lumière, mon désarroi n'importe pas. Notre rencontre donnerait des choses. Des conséquences, pourtant je vous verrais bien dans un café dans un premier temps, un café dans lequel vous n'avez pas vos coutumes, pour vous sortir de vos coutumes. Mais je ne donne pas suite déjà aux demandes auxquelles je suis intéressée. Alors... Je grandis, grandis, comme la plante habituée à l'eau et à la musique classique. En Egypte, auparavant... Il y avait des êtres humains, différents, qui pratiquaient l'inceste. Les cités bougeaient, on mangeait les filles, qu'on avait désiré bien avant, parce qu'elles étaient belles, et jolies. Nous sommes des poupées, Emile. Je ne sais pas si vous voulez que je sois votre poupée. Vous n'avez pas renoncé. Valencia, Prague, ce sont des belles villes ? Quels sont les hommes politiques qui les font marcher ? Je n'ai vu que des photos sur internet, donc ce n'est pas pareil que d'y aller sur place. J'aimerais y aller sur place. J'aimerais voyager. Et pas seulement astralement. Je voudrais y inclure mon corps, et pourquoi pas le corps d'un homme avec moi, pour me tenir compagnie. Quand on pense que la Tour 2 du prochain World Trade Center sera taillé en losange, pour éclairer de la lumière du soleil l'ancien site... Enfin vous savez. Et que Denis marche à côté de cet ancien charnier, ça me fait peur parfois. Rien que d'y penser. Cela me donne la chair de poule. C'était le but recherché, m'enfin voilà, pourquoi pas visiter Valencia. Et pas seulement d'une manière astrale. Mon corps doit y participer. On mange la chair, on mange le corps en souvenir de moi. Emile, vous êtes végétarien ? Comment ils font avec le Christ ces derniers ? Ils mangent pas le corps du Christ. Je sais, je sais, je sais je sais je sais. C'est pas la vraie chair, n'empêche qu'il y a toujours de la chair et du sang chez les rites chrétiens, ils sont pires finalement que tous les sorciers du monde. Denis me manque Emile. Vous saurez combler le vide, qu'il a laissé en partant ? Parfois je l'imagine rencontrer une autre femme, de son âge, américaine, dynamique, avec un corps de rêve et de l'argent à n'en plus finir, lui faire les yeux doux. Le baiser lentement dans une pénombre, dans quelque chose d'érotique, le décor est érotique, violent charnier mais érotique quand même. Tout ce qui est érotique est... La charogne est érotique, Emile, le vide. J'ai des vides à remplir, Emile, en haut, en bas, ma tête n'a plus toute sa fonctionnalité. J'aime vous écrire comme ça. Emile. Je ne sais pas si ça va me tenir longtemps, pour d'autres, la question serait vite réglée, mais j'ai reçu quand même des messages de vous, que je ne pouvais pas publier, parce que vous ne vouliez pas. Vous ne voulez pas exister, sauf à moi, tous les gens qui me lisent vraiment se comptent sur les doigts d'une main, vous ne risquiez rien pourtant, mon pauvre Eric, euh, Emile. Je confonds avec quelqu'un d'autre, désolée. J'ai l'esprit...Confus. J'ai comme un blanc, là tout de suite, des fois ça m'arrive. Et j'entraîne malgré moi les autres dans cette déchéance totale, sado-masochisme évident. Je me souviens à l'époque où j'avais un métier qui nécessitait parfois que je joue les maîtresses dominatrices, qu'est-ce que je pouvais bien m'emmerder dans mon boulot, j'avais l'impression d'être une petite arabe sans études à tenir le balai à l'usine textile du coin, climat toujours gris, je n'y prenais aucun plaisir, ça ne me plaisait pas, je m'ennuyais à faire lécher par terre son sperme à un homme d'affaire à poils, un peu gros, moustachu, marié, des enfants à l'université, certains avaient même des difficultés personnelles. Mais c'était mon job et je le faisais bien. Certains acteurs n'ont pas le choix : ils ont des rôles de merde au début de leurs carrières, George Clooney jouait avec des tomates géantes tueuses avant d'être connu. Marilyn Monroe se faisait prendre comme une sale chienne dans des endroits terribles avant de mourir suicidée et malheureuse. Emile, vous êtes connu de moi, c'est pareil, mais je vous avais dit : venez me baiser dans les coins, comme les chats pissent dans les coins, en silence, dans le dos de leur maître. Qu'ils cajolent lorsqu'ils ont faim et seulement lorsqu'ils ont faim, ou quand ils ont besoin de contact. Ils ont besoin de caresses. Les femmes aussi. Les femmes et les chats ont besoin de tendresse. D'attention. C'est un fait. Les hommes le pensent, les blondes le disent : souvent on oublie. Que les femmes ont besoin de caresses. De tendresse. Ils sont à bord de leur camion, de leur entreprise de pompes funèbres, aux commandes de leur sous-marin. Ils ont des enfants, des maisons, de l'argent, des maîtresses, ils ont fait une arche de Noé personnelle, intime. Par quatre, par trois, par deux. Seul. Je ne sais pas pourquoi vous voulez me rencontrer, d'ailleurs je suis persuadée que vous serez déçu. Très déçu. Vous vous sentirez perdu. Vous aurez des saignements de nez. La nuit viendra en plein jour et votre coeur ne pourra contenir une telle infâmie. Quand je pense qu'il est là-bas. Qu'il marche dans cette ville mourrante, qu'il y passe son temps, qu'il y travaille, qu'il y dort, qu'il y mange, quand je pense qu'il marche à côté de cet ancien charnier, sur lequel on pourra, à nouveau, marcher, quand je pense qu'il respire là-bas, avec toutes les miasmes qu'on peut y trouver déjà en temps normal, alors en temps d'après terrorisme... Allez à Paris, vous rencontrer, j'ai plutôt l'impression que je dois vous sourire là. Comme je passe mon temps à sourire dans le vide, c'est dans les yeux et dans la bouche de la folie qu'on trouve son double, mon double, Himmler, j'aurai le même, il faut que je trouve mon Himmler, à moins que je ne sois déjà l'Himmler de l'autre. Je ne sais pas si vous trouvez ça agréable. Moi je ne trouve pas ça agréable. Saignements de nez, la nuit en plein jour, je ne sais pas si vous entendez au bout de trois fois, trois visages, trois doigts, trois coeurs, trois rois. Trois Reines, et l'épouse en plus. Paris, il y a des catacombes là-bas, j'ai pas trop envie d'y tomber. On ne sait jamais vraiment où on met les pieds avec le net. Les gens qui vous écrivent peuvent très bien être autre chose que ce qu'ils prétendent être. Surtout ceux qui veulent vraiment vous rencontrer. Je ne sais pas si je tourne parano, Emile, mais j'ai quand même réussi à caser Himmler dans ma paranoïa. La prochaine fois, vous prendrez vos responsabilités, et vous vous présenterez sous un autre jour, qui était bel et bien léger et sombre, ce n'était pas du tout une invention de ma part, ou une erreur, j'ai vu la Réalité. Comme on regarde la lumière du soleil au sommet de la pyramide du Louvre. Encore faut-il savoir quelle est la nature véritable de cette lumière. Emile, dans les yeux et dans la bouche de la folie. Dans les yeux et la bouche de la folie. Entre doubles maléfiques, on se comprend.

11_septembre_022

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