Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
16 avril 2023

Le Crâne en obsidienne

x9yvj1f8rqra1

IF THERE IS A COP AT YOUR ELBOW

IF THERE IS A POLICEMAN AT YOUR ELBOW

J'ai envoyé le dossier demandé par email, une page de mon navigateur était ouverte sur une image religieuse qui m'intéressait représentant un martyr regardant le ciel, son flanc percé de multiples flèches. J'ai reçu une réponse : "merci de bien vouloir imprimer le document demandé et de déposer une copie papier au plus tôt sur mon bureau". J'ai pensé automatiquement : "mais quel con". Il aurait pu me le dire avant. Certains dossiers ne nécessitent plus de version physique, la majorité, c'est rare maintenant le contraire. Tout passe par le digital, on est plus en 2004 et AOL non mais LOL. J'ai travaillé de longues heures, fatiguée, me demandant ce que je faisais sur cette chaise, devant ce bureau, avec mes écouteurs bluetooth sans fil, mes premiers (je n'aime pas habituellement, rien ne vaut les filaires). Le son est correct mais beaucoup moins riche qu'avec des filaires. Mes jambes étaient lourdes. J'ai mangé du poisson, je me suis brossée les dents et les cheveux, je me suis couchée, j'ai fait un rêve et dans ce rêve je prenais une navette spatiale pour quitter la Terre. J'étais tellement heureuse de partir. C'était excitant. Je partais dans une navette sans fenêtres, on était allongé, d'autres gens étaient avec moi, on était tous très excités. A l'idée de partir. Enfin, partir d'ici. Enfin une vraie finalité, quelque chose de nouveau nous attendait. C'était fini les pyramides, les Franc-maçons, Emmanuel Macron, les livres nazes comme ceux de Frédéric Beigbeder, l'argent et courir après des choses qui n'existent pas, tout ce vide c'était terminé. On ne parlait plus argent, le sexe n'existait pas, on était dans des lits-voyages. Comme dans un train de nuit mais vers l'espace, dans l'espace, loin, loin du système solaire. Loin des autres humains laissés derrière. Loin, loin derrière. C'était vraiment un soulagement dans le rêve de partir. On arrivait. On sortait sur un monde nouveau. Tout allait très vite, il y avait des engins volants partout mais c'était plus impressionnant et beau que dans Le Cinquième Element. C'est vraiment un film très pauvre en comparaison, si je compare avec mon rêve. Il se passait des choses, des intrigues avec des aliens humanoïdes tout de noir vêtus, un peu mystérieux et effrayants. Mais je ne me sentais pas en danger, au contraire. J'avais envie de rester, je savais que la navette devait repartir bientôt pour la Terre et j'étais supposée partir avec elle. Je ne devais pas rester là. Et puis le rêve s'est arrêté. Je me suis réveillée, des mains me caressaient les seins, le ventre, les fesses. Une bouche s'est collée contre ma nuque. Une bouche masculine avec une barbe piquante. J'ai demandé à cette personne de se raser mais elle a refusé. Je ne peux pas décemment la forcer. Son corps est recouvert de poils, il n'a vraiment pas de chance d'être devenu une sorte de bête. Lui demander de tout raser ce serait un abus de pouvoir. Et sa bouche a laissé des traces de salive sur ma peau. Et j'ai pensé à mon rêve, partir de la Terre. Pendant qu'il me déshabillait dans le lit (je ne dors jamais sans pyjama). Et il a commencé à têter mes seins, à mettre sa langue dans mon nombril (ça chatouille), à mettre sa bouche sur mon sexe, sur mon clitoris. Et j'étais consentante puisque je n'ai pas dit non. Je n'ai pas dit oui non plus en fait. Je regrettais d'avoir quitté mon rêve. Pendant qu'il essayait de me faire jouir, j'ai pensé au dossier. Je l'ai imprimé, un jour de pluie. Je l'ai déposé sur le bureau. A côté d'un porte plume dans lequel une femme était gravée, une nymphe. Elle dormait dans l'eau apparemment. Un porte plume, en voilà un objet désuet. La personne qui m'a fait quitter le rêve a tenté de me faire jouir, avec deux doigts, très rapide. Ensuite il a pénétré mon sexe avec le sien. C'était chaud et plaisant mais aucun plaisir sexuel n'était présent. Je rêvais de repartir dans mon rêve. Qu'est-ce qu'on allait manger tout à l'heure à midi ? Faut toujours penser à ça. Et si on ne mangeait pas ? Et si Poutine gagnait la guerre, ou pire, la perdait, et faisait une explosion nucléaire sur l'Ukraine pour se venger d'avoir perdu ? Y'en a marre de l'Ukraine, des Ukrainiens et de Poutine, heureusement la réforme des retraites a changé de disque. Ce serait vraiment terrible si cela se produisait dans nos vies. Si une explosion nucléaire avait lieu. La bouche de l'homme m'embrassait bien pendant que son sexe était en moi et c'était le plus appréciable du moment. Je dois bien l'avouer. Je pensais toujours à d'autres choses, je savais que mon rêve était perdu. A jamais. Peut-être qu'il reviendrait. Il m'est arrivé de faire des "suites" de rêves rêvés des années auparavant. C'est particulièrement troublant. C'est comme une explosion nucléaire, je ne sais pas si tu vois ce que je veux dire. Il a éjaculé, il a grogné comme une bête, les hommes n'ont pas de chance, et ça explose et tout le monde devient de la cendre. J'ai vu la photo d'un démon un jour, certainement un prop de cinéma. On mettait des gargouilles pour chasser les mauvais esprits. La nymphe est restée dans ma mémoire depuis que je l'ai remarquée.

J'ai eu du sperme sur le haut des cuisses et sur les mains, je déteste ça, c'est poisseux. Désolée de ne pas aimer ça, certaines femmes aiment qu'on leur fasse dessus, moi je regarde la pluie par le fenêtre pendant que l'imprimante poussièreuse imprime et je me demande comment je vais m'en sortir avec toute cette pluie dehors. En moi. Le rêve est mort. Pourtant, l'angle science-fictionnel mérite d'être salué, je lis des livres de science-fiction entre deux polars de seconde zone. Je sais qu'en France, on aime pas la science-fiction, mais la France, on s'en fout en fait. Elle n'a pas de goût, ou alors ça sent la saucisse. Poisseuse. Un mec, un artiste officiel vient de dire à la télé qu'écrire c'est un échange, un partage. Mais c'est quoi ces connasseries ? Ecrire ce n'est pas un échange, un partage. Ce n'est pas faire passer des émotions. Ni des idées. Ce n'est pas partager un "bon moment" pour la "justice" sociale ou je ne sais quoi de  stupide dans ce genre. Combien de temps elle va durer la justice sociale quand vous l'aurez décrochée ? Au prix de combien de morts et d'explosions nucléaires ? Une explosion nucléaire va se produire bientôt, très bientôt, peut-être. Espérons. Voyez les choses de cette façon au lieu de juger cette opinion : ça nous apprendrait des choses sur la nature humaine actuelle qui s'intéresse qu'à des connasseries comme les réseaux sociaux, le sexe et l'argent. Ce serait excitant. Comme monter dans une navette spatiale et quitter la Terre. Mais pas pour aller sur la Lune, non, plus loin. Loin du système solaire, les humains laissés à eux-mêmes, loin loin derrière. Ce serait idiot de quitter cette planète pour atterrir sur un monde où des porte-plumes ont des représentations de nymphe des années 40. Pendant que je me débarbouillais, le sperme qui faisait des filins gluants entre mes doigts je me transformais en créature du marais, l'homme avec qui je me trouvais se rendormissait, doucement comme un ange il était parti. A nouveau dans son monde intérieur, cela ne l'intéressait pas de savoir qu'il avait interrompu mon sommeil avec son envie sexuelle. Il ronfle quand il dort et des fois je le regarde en me disant : "si seulement il dormait pour de bon". Pas un seul merci pour le dossier imprimé, pas une note de félicitations pour le travail. On est de vrais esclaves pour narcissistes dans cette réalité. Il y a plein de breloques africaines dans l'étagère, poussièreuse, la femme de ménage elle est payée pour vider la poubelle c'est tout. A peu de choses près. Des fois, je suis à la fenêtre et j'imagine dans le ciel devant moi, au dessus des arbres, des gens, des buildings, un immense champignon nucléaire, une explosion nucléaire. Et c'est plus fort que moi mais je souris. Je vois des humains transformés en cendres et c'est horrible, mais c'est un sourire qui se produit. Avec la langue sur les dents. Une explosion nucléaire, comme dans le rêve de quitter la Terre. Pendant que l'homme derrière moi joue à Elden Ring sur sa Xbox noire, un gros cube (non un rectangle plutôt, je sais pas je suis mauvaise en géométrie sacrée) avec une fente. Ensuite il va sur la verranda, il se fait son joint et se l'allume, il sait que je ne veux pas de l'odeur dans la maison, je déteste ça, il le sait. La nymphe gravée dans le porte-plume. Des breloques africaines, la pluie qui n'arrête pas, son sexe épais et long, quand il sourit à la télévision parce qu'il est assez vieux pour toujours, toujours regarder la boîte, avec cette double cruche de Léa Salamé dedans qui raconte semaine après semaine les mêmes âneries vaseuses digne d'un étang en Pologne, et mon dossier enfin terminé. La pluie s'était arrêtée, j'ai intérieurement prié pour qu'on en finisse tous, et c'est en posant le dossier sur le bureau de verre alors qu'il était absent, et ça m'a provoqué un coup au coeur, que j'ai remarqué pour la première fois, bien caché tout au fond d'une étagère, derrière des breloques africaines probablement fabriquées par des petits chinois dans les sous-sols de Paris, un crâne en obsidienne noir qui m'observait intensément.

Publicité
Commentaires
Publicité