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Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
13 octobre 2007

Polly Jean

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Je ne suis pas malade. Je n'aurais pas eu honte d'être malade, la honte ne fait pas partie de mon vocabulaire. Mais mon ami m'a dit que je n'étais pas malade, donc je le crois. C'est une amitié sincère qui se fonde non pas sur ce qu'on sait l'un sur l'autre, mais sur ce qu'on ne dit pas. Le non-dit a toujours été ma langue érotique, bien que je m'en défende. Je ne devrais pas frayer avec la vulgarité des corps qui m'entourent dans la vie. Peut-être que plus spirituelle... Je ne sais pas. En parlant de spiritualité, j'aime le nouveau disque de PJ Harvey. Probablement son plus épuré, son plus beau. Court mais beau, direct. Avec même une dose de pureté, une pureté inconnue jusque là dans ce qu'elle faisait. Quelque chose qui vous prend la poitrine, qui serre le coeur jusqu'à ce qu'un festival de boules lumineuses de toutes les couleurs ne sortent... du ciel ou de ce même coeur, serré comme ça. C'est la voix d'une femme qui me fait ça, ce n'est pas la voix d'un homme. Je ne suis pas malade, je l'ai souvent pensé. Même si dans le fond, je savais que non. Une question que l'homme à la barbe a posé : est-ce qu'on peut dire que vous jouez avec les gens ? J'ai dit : non. J'ai dit : parfois je dis quelque chose et ils comprennent le contraire. Je ne peux pas contrôler de comment les choses sont reçues, c'est valable pour n'importe qui. Il avait l'air rassuré, il avait l'air de suivre, même si je sais, comme ça fulmine, chemine, fulmine c'est peut-être un bien grand mot, une bien grande phrase. Il me faudrait utiliser les mots avec plus de tact et enlever ce côté langage écrit-parlé des plus désagréables qui me limite à une bande de malades, que j'aime certes, même certains beaucoup, mais malades quand même. Du temps que ça reste dans les récits, dans les codes des récits, dans les frontières, que je ne voulais pas qu'elles existent, les frontières existent toujours, les pays, les continents, les océans, les planètes dans peu de temps. Je peux mettre Gossip, ça ne me fera pas sentir mieux, mais plus joyeuse. Heureuse et triste, de l'autre côté de la rive à quoi ça peut bien servir. Dans un livre, un personnage religieux pensait que Dieu aimait ceux, aimait beaucoup ceux qui souffraient pour lui. Ou qui souffraient du monde. Le lien avec la souffrance c'est comme les liens du sang dans une même famille, on ne trahit pas le secret, sauf que dans la mienne si, moi j'ai volé les clés de la cité. White Chalk, craie blanche par dessus sur le tableau noir de ton adolescence en feu, comment j'aurais pu m'inventer une vie meilleure, les codes des récits, les frontières seront planétaires. Même si pour ça il faut qu'un esprit négatif recouvre toute la planète, les avancées ne se font pas dans les sourires ici-bas, rarement. C'est extrêmement fâcheux d'ailleurs. Sauf dans l'intime, les limites d'une personne, ses mains, ses pieds. Ses yeux. Son sourire, la première de ses qualités, surtout lorsqu'il n'est pas jaune ou cynique. Je peux mettre longtemps ce disque de PJ Harvey, même si lui n'est pas sensible à Polly Jean, même si lui... Son visage sur mon ventre, les frontières qu'il perce. Je suis heureuse, très bancale mais très heureuse, c'est un bonheur bancal, rempli de tiraillements sur quelque chose de négatif et de très puissant, de très prégnant, car ce qui arrive au port a de bonnes intentions mais seulement en apparence, je suis désolée de te le dire. Je suis désolée. Mais ça ne sera pas l'espoir qui dominera, ou alors pour de mauvaises raisons (comme actuellement, pour de mauvaises raisons). Entre donc dans mon cabinet de très tôt le matin à très tard le soir, passe donc cette frontière, la chanteuse de Gossip sera une grande chanteuse de rock dans l'avenir, franchement, une voix pareille, aussi identifiable et magnifique, ça serait dommage de passer à côté, on peut pas passer à côté d'ailleurs, d'elle, vu son imposante carrure, son imposante masse gelatineuse, elle serait moche si elle était Vanessa Paradis, c'est plus que certain. De l'autre rive, on voit les hommes sur les navires noirs, d'un bois noir arriver, on voit mieux de l'autre rive, je ne suis pas folle, je ne suis pas malade, la folie est une malade, on l'oublie trop souvent, comme dirait une greluche, les navires sont noirs et les hommes qui sont dessus n'ont pas de couleur, ni blanche, ni rose, ni noire. Ils sont prêts. Eux. Et toi, tu es prêt ? Il se préparait, il écoutait Pictures, de Katie Melua. Je ne comprenais pas. J'ai dit : tu as déjà ses deux premiers disques, elle fait le même à chaque fois, tu n'as pas envie d'écouter autre chose ? Un petit bisou sur les lèvres et hop, ma chérie, je te renvoie à tes frontières, égoïstes, forcément, même dans les petites choses, et je te fais comprendre que j'écoute ce que je veux, même si c'est trois fois la même chose, trois fois les mêmes disques, Katie Melua. Les navires noirs arrivent, je te ferais remarquer, tu ne pourras pas dire ensuite que tu ne savais pas, et faire ta petite victime dans ton coin, il faudra lutter, résister, même à l'intérieur de ton empire intime. Tu comprends ? J'espère que tu comprends parce que c'est très compliqué d'expliquer, je ne sais pas très bien utiliser les mots, ni même faire des jolies choses avec, les jolies choses je les fabrique dans la vie, pas dans la littérature, je suis désolée, toutes mes excuses, que tu sois là, obligé, obligé, de lire un écrivain sans talent, sans aucun talent, sans petites choses. A la télévision, à la radio, ils déplorent, les chroniqueurs (gros niqueurs aussi, ça arrive) que le talent se fait très très très rare, très rare, très très très rare, il faut éteindre son poste, ses postes, il faut prendre la plume, et il faut niquer tout ce qui bouge autour de l page. C'est la voie que Dieu a creusé pour moi, en l'occurence. Mais Dieu prend son temps parce qu'il est éternel. Le Chef cuisinier mettait les oignons dans sa casserole avec les tomates. Il faisait tout revenir. Ils reviennent. On en reviendra, avec un peu de chance, et comme dit Dieu et sa matière noire : avec moi. Les superstitieux : si Dieu le veut. Un truc avec Allah, il me faudrait tuer tout ça, une bonne fois pour toute. Tuer ces enfoirés de connards qui envahissent des pays d'enculés. Et tuer aussi ces enculés dans les pays qui se laissent envahir par des enfoirés de connards. Je ne souffre pas à cause de ça. Mon portable vibrait dans ma poche, c'est très pratique les prédictions téléphoniques, hélas ça ne change pas mon monde. Quand je l'ai sorti de ma poche, il était éteint. Tout d'un coup, il s'est illuminé de bleu : il sonnait. Le tennis n'est pas si grave qu'une prémonition inutile (quelle est la différence entre une prédiction et une prémonition exactement ?). Et ça ne rend pas les jeunes femmes folles pour autant. Ce qui rend fous c'est de vivre normalement alors que les navires noirs arrivent au loin. Ils ont des hélicoptères noirs avec eux, les navires aux voiles déchirées. Des sous-marins et des missiles et des armées. Ce ne sont pas des pirates, tu ne pourras pas dire que tu ne savais pas. Ils sont bien plus significatifs que des pirates, tu ne pourras pas faire comme si tu n'étais pas prévenu. Que tout est foutu et voilà. C'est un jeu pour eux. Mais pour moi qu'est-ce que c'est exactement ? Une pièce rapportée, une de plus, à rajouter, à l'impressionnante liste, liste unique, qui sévit ici, la folie des grandeurs, heureusement je ne suis pas folle, heureusement pas malade, et pas la folie des grandeurs non plus. Rien de tout ça ne m'habite. J'aurais aimé, mais non. Tu vois. Je voudrais tomber amoureuse de quelque chose qui n'est pas humain. Ce ne serait pas déception. Ce serait une putain de révélation. Je ne suis pas un rat en cage, pas encore. On ne fait pas d'expériences sur moi, pas encore. Peut-être que les hommes des navires noirs... Je suis pas trop contente d'être passée de l'autre côté de la rive, d'ailleurs, est-ce vraiment l'autre côté de la rive, et pas autre chose ? Il faudrait que je m'informe auprès de quelqu'un qui saurait me guider. Cet homme se guide à la voile, pas à la vapeur sinon il ferait un blog homosexuel, ou d'homosexuel, cet homme sait où regarder, quand il faut regarder, et comment il faut regarder. C'est un talent, qu'il a, que moi j'ai perdu, volontairement ou pas, aujourd'hui, ça importe peu de connaître les raisons de l'instabilité. C'est un homme charmant, rempli de charme. Il aimait bien Blur, cette chanson de Blur, Charmless Man, je crois que c'est ça, j'ai toujours eu du mal avec Blur. Sa bouche, ses yeux. Son tennis, son revert. Son coup droit. Etc. Toutes les choses qui font que ce disque est poignant, je ne sais pas trop le dire, Denis m'a dit que c'était un disque dépressif, White Chalk de PJ Harvey, moi j'y vois au contraire un disque joyeux mais précis sur la joie. Précis. Dans la voix, dans les paroles, dans la sobriété des instruments, un concept, un concept du tableau noir et de la craie blanche qui va avec. A l'école, à l'école on dessine des navires, ils ne sont pas noirs, ils sont jaunes. Ils sont jaunes et on fait des visages. On fait des visages avec la peinture, les doigts dans la peinture, cela m'arrive encore, je dessine des visages torturés, des visages américains torturés, parce que je cherche une Amérique qui me cherche elle aussi, mais on ne se trouve pas. Quelque chose de froid nous empêche. Le sourire de Jocelyn fait plaisir à voir. Elle vient pourtant de perdre son père à Chicago. Elle a perdu des amis dans les tours, elle a vu... Vous savez. Et bien je peux vous dire qu'il lui arrive de sourire aujourd'hui, par exemple en me voyant arriver dans ce café que nous apprécions toutes les deux (sans elle ça ne serait pas la même chose, je n'irais pas). Son sourire n'est pas jaune. Donc oui, on peut voir plusieurs de ses amis mourir dans une tour qui s'effondre et sourire quelques années plus tard, six ans plus tard plus exactement. Quelque chose empêche.

Tu me touches, tu me caresses, tu rentres en moi et pourtant, quelque chose empêche. Empêche depuis toujours. Cela ne veut pas dire, je le rappelle aux pauvres égarés dans leur égo et dans leur misère que ça sera pour toujours, mais depuis toujours, oui, c'est quelque chose qui empêche. Plus que quelque chose qui m'empêche. Je ne suis pas dedans, mais ça empêche. Il est dedans, mais ça n'empêche que depuis toujours c'est comme ça. Et que ça doit rester comme ça, même si ça va changer, car quelque chose empêche. Ce qui est possible dans le futur n'est pas figé justement, si j'allais tuer Antonio avant qu'il ne me touche, ça ne changerait pas ce que je suis, ça ferait une autre ramification. Les confusions spatio-temporelles sont compliquées à comprendre quand on est habitué à penser à ce qu'on était auparavant, par rapport à ce qu'on fait aujourd'hui. Et quand on est Témoin. Quelque chose t'empêche, ce n'est pas vraiment le bon terme. La douleur rénale est terrible, et elle paralyse la personne qui en est victime. Elle s'écroule par terre, le côté gauche en feu, elle est obligée de s'asseoir, les calculs rénaux sont terribles, et empêchent. Ce n'est pas la question du pêché, de ne pas pêcher, ces mensonges qui autrefois avaient, à cause de la boutique de mon frère, droit de cité. Dans le livre jaune, le recueil pour les enfants qui veulent devenir Témoins, on voyait beaucoup d'images, beaucoup beaucoup de dessins, d'idôles en fin de compte, il ne faut pas oublier qu'ils ne supportent pas les idôles des autres, mais que les leur elles ont le droit d'exister. C'est un paradoxe chez eux qui me concerne. Qui m'inquiète beaucoup. Denis a déjà eu des calculs rénaux, il avait l'impression de faire pipi du feu et des cailloux, c'était horrible. Il y avait même du sang. Mais comme ça empêche, alors je suis projetée dans ma tête, par la force des choses. Depuis toujours. Que c'est comme ça. J'aimerais que ça change, White Chalk, j'aimerais l'écouter encore une fois. Polly Jean.

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Commentaires
L
L'odeur de l'hôpital, je pense que c'est pire.<br /> En automne, avec les feuilles par terre, l'odeur est bien. Mais là, on s'égare.
A
Je ne fume pas mais je trouve que trop de gens arrêtent de fumer. C'est dommage parce que le monde sent toujours aussi mauvais, voire même plus maintenant.
L
"ta petite victime dans ton coin". Mr Badmouth, in the corner crying et à la fin il meurt. J'aime bien l'histoire de ne pas être malade. Et la folie. Et PJ Harvey, bien-sûr. C'est comme ça que je suis tombée sur ton blog. Polly dans la recherche canalblog. Soit. En passant, White Chalk est divin. C'est le genre d'albums qui me donne envie de mettre une robe blanche et d'aller sur une colline, plus près du vent. Et arrêter de fumer. Bonne continuation.<br /> <br /> Anne.
J
"Je suis heureuse, très bancale mais très heureuse..."<br /> <br /> j'adore ça.<br /> <br /> je le suis comme ça. heureusement.<br /> <br /> :-)
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