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Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
24 avril 2005

White

sans_titre145Message personnel à quelqu'un qui n'existe pas encore, à une fantaisie vieille comme l'existence des femmes, comme le désir de Dieu de prendre une côte de son mâle pour lui donner une femelle, digne de ce nom. Enfin bref, je m'égare, c'est sûrement le discours et le défilé de Benoît XVI qui me fait des frissons. Des chatouilles dans la raison. Je devrais m'en faire une, ce n'est pas de sa faute s'il a moins de charisme que Jean-Paul II. Tu as donc eu des pères potentiels. Tout d'abord, il me faut commencer par le commencement, moi qui lutte pour être la plus lisible possible : je suis une femme. J'appartiens à des créatures qui saignent une fois par mois douze fois par an, si tout va bien. Lorsqu'elles tombent enceintes, souvent c'est parce qu'elles l'ont voulu, sinon c'est parce que leur mari ou leur famille ou la société ne voulaient pas qu'elles avortent. Elles en ont marre, des fois, d'être prises comme des couveuses. Pourtant, dans le foyer de mon utérus, c'est là qu'un jour tu naîtras. Tu prendras de moi, de ma chaleur, je suis nourriture pour toi : c'est mère nature qui m'a faite et des fois, il faudrait lui casser la gueule. L'herbe est verte, les couleurs n'existent pas mais moi j'aime que le blanc. Sinon, en peinture, c'est du noir. Argument bien connu des panthéistes. Cela étant, tu m'aimeras, et moi aussi, mais sache que l'amour n'est pas une obligation entre une mère et son enfant : il peut se perdre, comme tout, comme la raison. Je devrais m'en faire une. Des chatouilles et un pardon. Un calin arrange bien souvent le problème. Pour te faire je dois jouir. Et sache que l'amour n'a rien à voir souvent avec jouir. Je dois rencontrer un homme, sobre de préférence. Le fait de l'aimer est accessoire (je dis ça juste pour faire enrager les romantiques) et il doit sentir du désir pour moi. On pourrait voir les choses autrement : il doit avoir envie de me baiser à mort. De me têter comme à l'époque où il avait l'âge de têter sa mère. Il a arrêté à cinq ans. Un garçon que je connais, j'ai eu honte pour lui lorsqu'il me l'a avoué, je comprenais, tout d'un coup, comme dans une révélation papale, le pourquoi de son caractère, insupportable. Bon j'arrête de rigoler dans mon pubis toute seule. Pour te faire, de préférence, je vais essayer d'aimer l'homme qui me pénétra, avec son sexe. Si tu deviens garçon, tu comprendras vite pourquoi ça se lève automatiquement le matin, si tu es une fille, tu comprendras vite pourquoi tu as peur des garçons. Je te souhaite donc d'être garçon, dans mon ventre, la nourriture. Je te veux depuis environ deux ans. Je sais, je suis jeune mais c'est juste mon corps, moi j'ai déjà vécu avant mon corps. Tu sais. Bon, trève de délire, c'est juste une impression mon chou. L'homme va rentrer en moi, j'ai un trou, il dégouline de désir pour les hommes et pour les enfants, c'est mon vagin et lui il n'aime pas les monologues des putes sur scène, ridicules. La honte ce théâtre d'un autre âge, fossile. La honte. J'ai honte. Les monologues du pénis il paraît qu'ils font les hommes, pour répondre, bientôt on aura les monologues des ongles, des orteils pour les fétichistes des pieds, les monologues des morpions chopés au bordel pourquoi pas aussi. Le théâtre français est devenu Monoprix, avant Carrefour, un petit peu plus grand. Bref. Tu vas naître là. Regarde la photo de la jeune femme, elle a été payée pour poser, ne te fais pas avoir. Je suis heureuse de savoir que tu n'existes pas, je suis heureuse de savoir que tu vas exister un jour. L'homme va éjaculer au fond de moi. Les hommes croient qu'on sent, parfois, ce qu'ils mettent mais moi je n'ai jamais rien senti. Ensuite, la graine va faire son travail dans la nourriture. Dans mes terres.

akt_04Tu vas grandir. Tes muscles vont pousser, tes os, tes yeux, ton nez, ton ADN, ton BAC C, ton sexe va se définir, ton sang, tes organes, tes dents préparées, des petits cheveux, les bulbes, les orteils (on y revient), les doigts, ton goût pour l'eau sucrée, tu respires de l'eau, tu entends la voix de tes pères potentiels, l'odeur de l'air quant on jardine, le soleil sur la peau, la pluie sur la tête, dans la voiture, comment ça flotte, tu vas pousser comme ça. Tu vas grandir en moi. Tu pourras grandir. Je n'ai jamais été enceinte, ne le suis pas, je précise. Finalement, sur mes morts, je sais parler aussi des vivants. Tu vas grandir, certains adultes mettent de l'espoir en toi. Tu sais. A outreau, on tue l'espoir disent certains, on parle de "victimes", les enfants sont détruits à vie disent certains. Cependant, je suis la preuve que non. Je tiens à ce que tu le saches si dans ton coeur tu es meurtri, si c'est douloureux, si tu n'en peux plus. Je ne t'ai pas fait avant parce que le monde dans lequel j'étais me faisait trop honte. Indigne de toi. Je n'ai pas trouvé de père non plus (ça surtout aussi) mais le monde. Ton cerveau, ta colonne vertébrale, ton foie, la flèche hépatique, le pouce, les fosses nasales, la langue, l'estomac, les sucs gastriques. Les testicules, les ovaires, les yeux, la cornée, les zygomatiques, les joues, les épaules, les fesses. Tu vas grandir, devenir quelqu'un. Tu vas te nourrir dans mon ventre, de mon ventre, tu vas te sentir au chaud. Et moi je vais pleurer, inquiète : avec toi je vais perdre ma liberté. Je vais tout perdre, et ça va me crever le coeur. Mais c'est comme se jeter dans le vide, et tu m'aideras. Je vais t'aider à grandir à l'extérieur, en souhaitant que tu reviennes au chaud dans maman. Je serai ta maman révolution. J'aurai forcément tort souvent d'imaginer ce qui nous arrivera. Un jour je serai enceinte de toi. Bon maintenant, passons aux choses sérieuses. Tes pères. Potentiels. Lesquels ? Tu as failli avoir comme père potentiel un homosexuel refoulé. J'ai honte de t'en parler mais c'est la vérité. J'étais comme Suspendue in Gaffa et la Gaffe, on m'aurait ensuite appelée moi Gastonne. Il y a quelqu'un à la porte qui sonne. Tu vas grandir comme mes tomates, comme mes pensées, comme mes géraniums, comme mes roses avant qu'elles ne se fanent.

sans_titre1Sauf que jamais tu ne te faneras. Jamais. Cours, vite. Et jamais ta maman se fanera. Elle aussi. Elle aura 43 lorsque tu en auras 20, elle t'aimera tellement qu'elle se glissera dans ta chambre tard le soir, elle sortira ta queue, tu te laisseras faire dans un état de régression terrible, et elle te sucera, comme si elle prenait le biberon de toi. Non, je plaisante. Elle n'a rien à voir. Cependant, si elle est trop fusionnelle, dis-le lui. Ton père potentiel actuel, c'est Denis. Elle emmerde les gens qui viennent ici avec depuis quelques jours. Elle est chiante tu sais. Et têtue. C'était déjà ton père potentiel à une époque où tu aurais pu naître de leurs rapports...De leurs échanges. Si tu vois ce que je veux dire. Je vois que tu vois ce que je veux dire. C'est bien. Cours, Forrest, cours. Et elle te sucera et les couilles avec...Non bien sûr. Sache que ça ne se fait pas, dans une même famille. Sache que les fantasmes de ce genre ne sont pas amusants. Tu risques la mort, tu en es conscient ? Ce n'est pas amusant d'être un zombie, comme dans L'Armée des Morts, film excellent. Ton père je l'aimais déjà à l'époque sauf que j'étais sa putain on va dire pour faire abrégé. Et lui mon client. Tu ne le sauras pas. Il m'a dit hier soir au téléphone, et tout à l'heure à midi : j'aimerais avoir encore deux enfants. Il a déjà un fils. Un fils qui est avec sa mère, son fils ne veut plus le voir, pourtant il lui envoie des lettres, des cadeaux, de l'argent. Sa mère ne veut plus. Elle ne veut plus soutenir la relation père-fils. De son fils. C'est une garce, mais elle a ses raisons de garce. On va dire. Je ne la connais pas. Et son fils non plus. Il sera ton demi-frère. Si tu le connais et que vous vous aimez, vous serez frères, on n'est pas frère à demi. Sinon, si tu l'aimes pas, tu n'auras qu'à dire, à la rigueur : nous avons le même père. Nous avons le même père. Bien sûr. Comme moi, Oussama et Benoît. On a le même père. Et Forrest aussi. C'est dur pour moi de te dire ça, en même temps c'est léger. Je voulais te dire avant que tu ne sois là, un jour peut-être, car je ne vais pas être courageuse tout le temps, on ne l'est pas tout le temps, sauf les Grandes âmes, je suis déjà exceptionnelle, je crois que je n'aurais jamais une grande âme, un Grand coeur noble. Quelque chose dans ce goût là. Je suis faite pour diriger des dictatures amoureuses. Des puretés obscènes, assassiner des assassins. C'est très adolescent. Lorsque tu seras adolescent, je vais certainement te tuer, ou ça sera toi. Tu vas me décapiter. Ensuite niquer mon cadavre à mort, le sodomiser. Ensuite tu mettras le feu à ton père potentiel. Tu vas boire, lui pisser à la gueule. En disant : dit encore que nous avons tous le même père ?!

Denis sera peut-être ton père, ou pas. Je voulais te faire toute seule il n'y a pas si longtemps, prendre le sperme du premier venu, même du plus débile. Attention, j'en voulais un beau, pas un laid. Mais je ne voulais pas avoir honte après. Et puis ça ne me ressemble pas de faire la cuisine à la va vite. Je devrais me faire une raison. Ma couleur c'est le blanc, toutes les couleurs de la nature mélangées, comme White, Carrie en anglais.

hstars27ANGELINE

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Commentaires
L
Angeline,<br /> Je pars faire une pause d'Angeline...Parcequ'Angeline me trouble ...Parcequ'Angeline me met mal à l'aise...Que je ne peux m'empecher de lire ces pages qui me font mal...Peut être parcequ'il y a chez elle, des choses qui me sont trop familière...Je pars pour quelque temps...Continues...Tu resteras dans mes favoris mais je vais essayer de te fuir...<br /> Au fait, pourquoi écrire un blog et pas quelque chose de plus concret (même si un blog reste pour moi quelque chose de trés profond)...Tu en as le talent...J'en suis jaloux !!!! Arrrggg...<br /> A bientôt Angeline.<br /> L'homme au chats
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