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Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
27 novembre 2007

L'Heure du bain après la mine

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"Le problème avec la vie, c'est que l'on ne sait vraiment pas du tout ce qui se passe."

PHILIP ROTH Tromperie

Ses amis prennent soin de la femme pendant l'absence de l'absent. Dans sa presqu'île où rien ne tombe jamais, où tout repousse dans sa splendeur, il est loin le temps des considérations de la femme. Je sais de quoi je parle, il est très occupé. J'ai envie de baiser tout ce qui traîne. Tout ce qui peut traîner. Philippe. Eric, Matthieu, Jean-Edouard, Charles. Tout ce qui pourrait faire de moi Sa femme, pour de vrai. Pour qu'il y ait tromperie dans un couple, il faut le couple. Et l'amour. Sinon la tromperie n'est pas une tromperie, mais juste un autre chemin. Ce qui ferait de moi sa véritable femme, la queue de Jean-Edouard par exemple. J'ai une raideur dans la nuque, j'ai mal aux yeux quand je regarde la lumière de la lune. C'est dire. Dans ma presque tombe...Mais non j'exagère. J'exagère souvent. Encore aujourd'hui. Je suis à deux doigts d'exagérer comme avant. On ne peut pas vivre la vie que les autres voudraient qu'on vive pour eux. Il paraît qu'on a une seule vie, qu'on en fait ce qu'on veut. Je n'aime pas parler de ça, parce que ça me fait penser aux Dieux. Et à tous ceux qui sont morts sur une croix pour nous, Jésus Christ et tous ceux qui avant lui, sont morts sur la croix comme lui, et qui ont eu une histoire étrangement similiaire. A ce qu'on raconte. Il faudrait que j'assume mon côté Pinoncelli (ha), mais en fait, même pas, ça ne m'intéresse pas. Tout ce qui est intéressant, dans le magma du monde, c'est de mordre sa lèvre inférieure. A deux doigts. Je suis. De craquer sur le premier venu qui me tendra....Sa générosité. Ils sont si généreux : tiens, je perds tout. Oui, je sais. Tu ne peux pas retenir. L'argent dans ton porte-feuille, à quoi il sert ? Et en plus, tu es là, debout, sur les quais de la Seine, tu es venu me voir tu t'es donné la peine, et les feuilles d'automne tombent, tombent, sur ta tête, sur ton chapeau. Sur tes oripeaux. C'est amusant, de fréquenter tes amis, pendant que tu n'es pas là. Cette femme qui t'apprécie dans le regard ça se voit. Elle te touche. Elle te caresse. Elle te lèche, te suce, mouille pour toi. Dans ses regards. Chaque fois que ses yeux se posent sur ton corps. C'est sûrement les épaules larges qui doivent lui plaire. Elle me fait un sourire comme une Desperate Housewive, elle se félicite de pouvoir me mépriser entre les lignes. Certains croient que tout se joue entre les lignes, mais non, c'est dans la ligne que tout se joue, et même, que tout ne se joue pas. Il ne faut pas oublier, entre les lignes ça n'existe pas, mais différents plans, oui. Je ne suis pas d'un temps que les... Je ne suis d'aucun temps, d'aucune ville, d'aucun océan. Tu es, toi, bien affirmé dans ton heure, ce n'est pas celle du bain après la mine. Le charbon s'avale plus facilement dans une bouteille en plastique. Liquide. Elle te caresse. Elle a du désir à revendre dans son regard. J'étais presque gênée l'autre fois, de la voir, sans toi, elle était contente de me voir, elle me l'a dit, j'avais bonne mine. Après l'heure du bain. Mais j'ai passé un bon moment, quelques confidences de thé, de café, de tisanes, ensuite je suis rentrée chez moi. J'ai touché ton piano, ta guitare je ne sais pas y toucher. Elle gratte. J'ai fait une salade. J'ai mangé du poulet froid. J'ai lu. J'ai regardé un film. J'ai recouvert mes peintures. Je me suis brossée les dents, je me suis couchée. J'avais envie de sexe mais j'étais trop fatiguée pour ça. Je me suis dit : on verra ça demain matin. Toute seule. Je lutte pour ne pas sombrer, on verra ça demain matin. Après la mine, l'heure du bain. Je ne suis pas avec toi, je m'en rends compte tous les jours. Et parfois, même lorsque tu n'es pas en Amérique, je ne suis pas avec toi. Je m'en rends compte toutes les nuits. Sauf lorsque tu es celui qu'il me faut pour avoir du plaisir. Là tu es celui qu'il me faut, je m'en rends compte à chaque souffle, à tes yeux aussi. Je suis avec toi. Ces grimaces que tu fais aussi. J'adore. Non je n'adore pas, j'aime beaucoup. Je n'ai pas mon veau d'or à moi, tu parles, à New York il y a un taureau non ? Noir. Je l'ai vu en photo. Je l'ai vu. Elle aimait ma compagnie, je dois te le dire. Elle aime toujours la compagnie. Je crois qu'elle se sent aussi seule que les autres. Je crois que c'est aussi dégueulasse que chez les autres. Et en même temps, dégueulasse on l'embrasse, on aimerait bien le prendre dans les bras. On se rend compte que ça fait une dichotomie. On se rend compte de la chose, qu'elle ne va pas. Dans le sens des aiguilles d'une montre. Comment je peux t'aider ? A regarder l'homme qui me baise, mieux ? Ce n'est qu'un regard. Ce ne sont que des yeux. Ce ne sont que des objectifs. Des buts qui n'en seraient pas dans notre plan. Ce n'est rien. Je t'en prie, ne reviens pas en marchant sur l'eau. Je ne voudrais pas que ça te semble facile. Je ne voudrais pas cela me charme. Je ne voudrais pas être impressionnée. Subjuguée. Comme parfois, avec les grimaces de ton visage. C'est comme une petite mort cette absence. Mais parfois, à côté de moi, c'est comme une petite mort, la présence. C'est tellement compliqué. Je suis tellement fatiguée. Je regarde les jolies cartes postales. Je regarde tout. Les fleurs. Aussi. Et leurs yeux sourieurs. Tes amis. Avec le temps, peut-être qu'ils deviendront mes amis, certains d'entre eux ont toute la capacité, tout le potentiel. Juste ciel... Et moi, est-ce que je saurais être leur amie ? Une amie ? Tu crois ? Tu penses que mes regards sur tes amis sont corrects ? Tu penses qu'on peut lire en eux comme dans un livre ouvert ? A la bonne page, qui plus est ? Je me suis couchée, ensuite, j'ai fermé les yeux très vite. Et j'ai rêvé que j'étais au Portugal avec toi. Et que George était là, également. Avec son chignon, il était très androgyne, très homosexuel. Il avait perdu du poids, et sa peau était encore plus bronzée qu'à l'époque où nous étions enfants. Et que son asthme était tel qu'il faisait des crises terribles, même à cause de fous rires. Des crises de fou rire. Ensuite, j'ai entendu mon frère dans la maison en face, il parlait à quelqu'un, à une vieille femme. Mais je ne pouvais que les entendre. C'était très frustrant. Ensuite, je faisais l'amour avec Philippe, ton ami qui avait cette maison étrange en Bretagne. Nous y sommes allés. On avait la plage à portée de main. Mais il faisait gris et des méduses éclatées pourrissaient dans le sable. Je crois que c'était la plage d'un meurtre de Francis Heaulme. Et je m'y sentais mal à l'aise, je pensais toujours à l'endroit où ça s'était passé (j'ai écrit : où ça se passait), il était mauvais. Heureusement que tes larges épaules étaient là. Heureusement tout ça. Certains sont contre l'interdiction de fumer dans les lieux publics. Moi je suis contre le public, tout contre. Ils fument toujours le cigare. De plus, tu communiques plus avec eux qu'avec moi, j'ai essayé de décoder des choses dans leur regard, ce n'est pas difficile. Ce n'est pas la mort. Ce n'est pas une petite mort, une petite absence. Ils sont gentils avec moi maintenant. Et je ne fais plus attention d'ailleurs, aux éventuels heurts, qui pourraient m'affecter, leurs paroles, leurs dires, leurs attitudes, ce qu'ils sont, ce qu'ils ont été, ce qu'ils seront. Nous sommes parfois les erreurs de nos erreurs. Je crois que je cherchais une réponse, en t'embrassant. Dans le rêve, ton ami Philippe m'embrassait. Pourtant, plus homosexuel que lui, tu t'immoles par le feu. Il m'embrassait, je l'embrassais sur le torse aussi. Il me montrait son entrejambe. Il avait deux boutons rouges près des testicules. Il semblait m'aimer. C'était tout nouveau. Notre amour. On faisait l'amour. On voulait faire que ça. Tout le temps. Dans une de tes chambres vides. Chez toi, Antonio. Ensuite, j'ouvrais un sac et je voyais deux serpents qui s'accouplaient. C'est mauvais signe, le temps gris en Bretagne. Les nuages changent si vite. Ensuite, je me retrouvais toujours avec Philippe dans un entrepôt. Quelque chose d'étrange. Il venait me voir ici ensuite. Tu ouvrais la porte, Denis, et tu le prenais dans tes bras pour le saluer. Il me regardait avec des yeux noirs et plein de désir. J'avais hâte qu'il parte. Tu ne voyais rien. Tu ne savais pas voir. Ce qui me désespérait. Ensuite, je me suis réveillée. Ce qui est bien avec moi, tu me l'avais dit, c'est que je reste la même. Tu me disais : ne change rien. En vivant avec moi. Ou moi, en venant vivre avec toi. Je pense que ça s'est fait dans ce sens et pas dans : nous vivons ensemble. J'ai dû faire un effort supplémentaire, et tu étais dans l'attente, se quitter n'était pas envisageable. Parler de tes cartes postales, de tes amis, de ton sexe, de la texture de ton sperme, rarement liquide et transparent, toujours consistant et épais, ce que je préfère, parfois un peu gluant, tout ça ne sert à rien. Cela ne me prouve pas que tu m'aimes, ou que je t'aime comme je me le prétends parfois à moi-même. Confiante. Il me faudrait un air qui sorte des années 80, ou similiaire. Pourquoi pas. Il me faudrait ton corps au chaud près de moi. Il faudrait que j'évite, dans mes rêves, de voir Philippe me faire l'amour, il a certainement le sida, comme la plupart des homosexuels, ils sont bêtes, ils ne font attention à rien. Et voir des serpents qui font l'amour, alors ça... C'est le pire. Ils étaient dans un sac noir. C'est pire que tout. Omayra Sanchez est morte dans une eau boueuse, elle a dit au revoir à sa famille, elle avait les yeux gonflés et noirs de sang. Douze, treize ans. Je ne veux pas finir comme elle, mais si j'ai une fille un jour, de toi ou d'un autre, sûrement de toi, je pense l'appeler Omayra, je trouve ça très joli comme prénom, et cette pauvre gosse qui ne méritait pas de mourir était incroyablement belle pendant sa mort. Je ne l'ai jamais vue pendant sa vie. Dommage. Mille fois dommage. Confiante, parfois je me le dis. Tu es près de moi. Finalement. Je te sens. Ton odeur est restée dans la M A I S O N. Ce qui est rassurant. Ce qui me rassure. Le monde est tellement hostile, ton odeur c'est une balise dans un Atlantique nocturne tourmenté. Les sirènes depuis longtemps ne chantent plus pour les marins. Les femmes depuis longtemps n'attendent plus de nouvelles aux ports. Moi j'attends de tes nouvelles, et je crois que ça me crève le coeur d'en recevoir si régulièrement. La mère de tous les paradoxes, ma fille devrait s'appeler Paradoxe. Ce serait plus juste. Paradoxe, tu viens au parc ? Jouer avec tes petits camarades ? Je te donnerai tout, un amour béton, une nécessaire fusion, et un bon bain après ton retour de la mine. Ton odeur est restée dans la M A I S O N mais est-ce que moi je reste dans ton odeur ? Non bien sûr. Je la fuis, je cherche des odeurs artificielles comme dans un précédent billet des paradis artificiels. Celle du cigare par exemple. Rien de plus artificiel. Dans le ciel... Toutes les odeurs peuvent nous tromper sur qui les dégage. Je ne voudrais pas que tu reviennes trop vite. Cette dépression est trop merveilleuse, on dirait le printemps arriver alors que la neige ne cesse encore de tomber. C'est un sentiment grisant, c'est parce que je ne sais pas vraiment quoi faire de ton amour. De ton amour, quand ta voix est lasse, à l'autre bout du combiné. Et les gens reviennent après avoir voyagés... Reviennent changés... Moi aussi. Je n'ai pas bougé, mais j'ai quand même voyagé. Bon, pas dans l'astral, rassure-toi, mais ça te fera la même impression : j'ai peut-être changé. Peut-être que la folie du monde est allée voir ailleurs, elle qui se trouvait dans une partie de ma gorge, de mon thorax, de mon coeur. Il faut pousser très fort, mais pas en bas, sinon c'est autre chose qui s'expulse, il faut pousser le thorax, pour faire sortir le coeur, sur le devant, ou le côté. Ta main sur mon plexus solaire... C'était quelque chose. Les lobes des oreilles que  tu aimais mâchonner, c'était autre chose. Quelque chose d'autre, autre chose dans ton regard, dans tes yeux, les corps des autres. Les Américains, les étrangers sur le sol Américain. Je ne sais pas te satisfaire, et pourtant tu es satisfait. Je ne sais pas te parler et pourtant tu m'entends. Tu sais, c'est presque avec les larmes aux yeux que je te dis que je ne veux pas de la peur à New York. Je ne peux pas faire autrement, je ne veux pas de la peur à New York. Je te veux toi, même si tu peux prendre ton temps pour revenir, cette dépression est merveilleuse, c'est comme si la neige ne cessait de tomber pendant l'arrivée du printemps.


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