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Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
15 mars 2006

Enceladus, tu porterais la vie

enceladus

Je n'ai pas tout dit mais : j'avais les yeux fermés et je dormais (il m'arrive souvent ces derniers temps de dormir les yeux ouverts, je m'en rends compte, je vois le plafond et dans mes yeux je vois des images, comme dans une télévision, je suis allée en parler à mon médecin généraliste qui est une femme, je ne voulais pas de l'autre, ce putain de gorille qui vous viole en vous serrant la main, et elle m'a dit : vous êtes stressée en ce moment ? Vous vous sentez déprimée ? Elle est nouvelle, j'ai failli lui rire au nez. J'ai failli lui dire : ma belle, enfin, à quarante ans ça va, ton alliance, ton gilet blanc brodé, avec des fleurs, ma belle, si tu savais, tu pourrais être ma mère on dirait presque, mais moi ma mère je ne veux pas lui parler, j'ai tout cassé en lui disant que j'avais été la victime d'août et de son frère. Elle m'a donné des vitamines et le soir je bois une tisane, d'où bien entendu, mon style naze (non ça c'est faux) et ma littérature nullissime (bon, mais ne le dites pas) La parenthèse était longue pour rien). Pour une fois que j'avais les yeux fermés (remarquez il est nécessaire parfois de vivre de drôles d'expériences, elle m'a dit : en fait c'est une partie de votre cerveau qui se réveille alors que le corps est endormi, vous êtes consciente et vous dormez en même temps, c'est un état étrange, effrayant. Non ? Oui assez. Elle avait les mains calleuses. Elle ne semblait pas heureuse, c'était quoi, petit coeur, ton mariage ? Ton boulot ? Les médecins généralistes sont dépressifs, qui s'occupent d'eux, personne, ils ont des filles suicidés, des fils égorgés, et des cancers du foie). Et je me réveille (j'adore me réveiller en pleine nuit, c'est comme d'être à un endroit dans lequel on ne devrait pas se trouver). Et je la vois, elle, avec ses seins opulents, provoquants à eux-seuls, et elle pleurnichait. Elle essuie ses larmes, elle essaie de cacher. Tous, on a quelque chose à cacher (surtout le Prêtre, il avait sa queue à cacher, sous sa soutane, et même les religieux en général, leur queue à cacher, l'intimité, ils ont un problème avec, comme chaque homme, chaque homme qui est perlé dans la glaise). Et je lui demande : tu pleures ? (Le genre de questions qu'on pose tout en sachant la réponse, on ose peut-être pas y croire, l'heure n'est pas à la gloire, de voir quelqu'un pleurer, les seins provoquants, beaucoup d'hommes payeraient pour être à ma place, des entrepreneurs vulgaires, des barmans légers au niveau de la sincérité, des violeurs, des trompeurs de femmes, des alcooliques, des résistants de la Seconde Guerre Mondiale qui voudraient retourner à la Troisième, ne sachant pas quoi faire depuis). Elle dit : oui un peu. Elle sait que j'ai vu (elle sait que je sais que je vois). Et là, elle me dit : je me posais des questions. Souvent, ils pleurent dans le lit, ils se posent des questions la nuit, surtout la nuit, seulement la nuit. Seulement la nuit ? Nos baisers n'étaient pas les pires, pour faire une référence à Nina Morato qui aurait mérité d'être plus connue, et ils pleurent dans la nuit et ils attendent qu'on se réveille (qu'on ouvre les yeux pour de bon, qu'on voit et qu'ils sachent qu'on sait voir). Elle m'a dit qu'elle se demandait. Quand j'allais lui dire au revoir, goodbye baby love, je me suis bien amusée à faire la lesbienne (je sentais la colère poindre en moi, la bouillie qui montait, la moutarde qui allait me rendre exotique, épicée), quand j'allais me remettre à la chasse aux hommes, les hommes étant tous par définition meilleurs sexuellement que des femmes, tous les avantages d'une femme sans les inconvénients, c'est dû à Dieu, comment il a fait les corps, Dieu veut être un homme sexué dans sa tête, je vais te dire, Dieu dans son inifinie puissance est un incapable chronique, laissez le mal s'installer sous prétexte d'égo bafoué, tu parles, à d'autres. Et là je me calme avant de lui répondre. Ce n'est pas bon (de dormir les yeux ouverts, ça fait souffrir). J'ai souvent eu l'impression d'être une salope de borgne dans votre royaume d'aveugle, ça fait souffrir, je ne veux pas devenir aveugle, je ne veux pas dormir tranquille dans mon confortable chez moi, je ne veux pas, pas aujourd'hui, pas demain, après-demain peut-être, d'ailleurs après-demain c'est prévu, j'ai noté dans mon agenda : dormir tranquille, vivre heureuse, c'est prévu, et ça m'arrivera, soyez-en convaincu bande de juges (le juge Burgaud, merci, merci, d'avoir parlé à la télévision, vous avez mis un coup fatal à l'institution et ce n'est que le début, judiciaire). Je suis heureuse de ça. Je lui ai dit que lorsque j'étais avec quelqu'un, je n'allais pas voir ailleurs. Même les tentations, bah tu parles, il faut que ça marche sur des chairs molles, personne n'est parfait, ça ne marche pas sur moi je suis pas parfaite, je suis obstinée, je suis têtue m'a dit Jean. Ah. Je ne veux pas être têtue. Je suis allée vers elle, j'ai caressé ses seins, comme du pudding près du mamelon. J'ai eu envie de manger du pudding. Je lui ai demandée : on dort ?

murphy

J'ai encore dormi les yeux ouverts, en étant consciente que mon corps était endormi, je voyais des images dans mes yeux mais aussi le plafond. J'étais consciente du repos de mon corps. Et de mon esprit éveillé. De cette partie du cerveau qui se met tout d'un coup en éveil donc. Encore aujourd'hui, on m'a dit que j'étais quelqu'un de rare, et bien le mal n'est pas chose rare, G, alors peut-être, que dans tes seins je suis bien. Oui c'est sûr. C'est comme deux petits puddings dans des assiettes, avec des cerises dessus, ça fait penser à La Grande Bouffe, ce film inégal mais au moins un vrai film. Les français faisaient des films avant. Elle m'a dit ce qu'elle pensait de moi. Je devrais pas l'écrire, je devrais le garder pour moi. Quand je ne garde pas pour moi, finalement je veux devenir vide, il faut garder pour soi, regarde les autres, ils y parviennent, avec classe même. Qu'est-ce que tu en dis ? Hein ? Regarde son cou, regarde ses seins, regarde sa peau, ses épaules, ses cheveux longs, deux femmes avec des cheveux longs, je vais changer, je vais me faire une coupe au carré, je vais les couper, ils sont trop longs. Je ne veux pas. Je ne veux plus. Tant pis. Jean les trouve si beaux, si doux, Denis me disaient : ils sentent si bons alors que maintenant il m'écrit que je n'ai qu'à y aller, me faire sucer par une femme, de toute façon ce n'est pas la première fois que je fais n'importe quoi et que je me persuade qu'il s'agit là d'amour. Mais je veux dire : qu'est-ce qu'il vient, là, m'adresser la parole ? Pour me dire ça ? Qu'il ferme sa putain de grande gueule, elle sent mauvais. De toute façon. Il est jaloux, c'est tout. Tu es jaloux, parce que je ne te dis plus de venir, tu sens le réchauffé des plats William Saurin. Je suis méchante et bête mais qu'est-ce que je peux faire ? La caresser, pour résister, peut-être que c'est dans cette peau, cette chevelure, droite comme un i, sur le dos dans le lit, les yeux grands ouverts, le plafond en face, et les images du rêve en plus, superposés. Ceux qui ne l'ont pas vécu ne peuvent pas imaginer ce que ça fait. Et bien ça fait bizarre. Cela fait très mal. Cela vous fait très bobo dedans. Très très. Comme deux petits puddings qui s'agitaient avec force devant moi, comme dans La Grand Bouffe. Elle dormait. Elle dort. Elle était comme un rêve, là tout à l'heure, à côté de moi. Elle était comme offerte au monde, je sais pourquoi je ne veux pas dormir, je ne veux pas être offerte, ni même m'offrir. Cela peut vous sembler paradoxal. Celui qui n'est pas paradoxal peut venir m'écrire qu'il m'aime de tout son coeur, et qu'il est sincère. Cela fait très mal. Son nombril. Il aimait lui mettre sa langue, dans le mien, je veux dire. Denis, hein ? Peut-être que c'est fini pour de bon. On a peur, de ces mots-là, fini, on a peur ? Moi j'ai pas peur, on fini toujours par finir quelque chose. Toujours. Je l'aime ? Je l'aime ? C'est dur d'être une lesbienne ici maintenant, là tout de suite. Vous ne sentez pas une odeur de merde depuis que vous êtes arrivé à cette ligne ? Je me suis levée, j'ai finalement réussi. J'ai fait le moins de bruit possible. Pour me rhabiller. Il était pas tard pourtant. J'aurais pu dormir. J'ai écrit un mot, j'ai embrassé le mot, je ne l'avais jamais fait pour personne, embrasser une lettre pour y laisser la marque de mes lèvres. C'est la première fois. Je ne pouvais pas rester. Il fallait que je rentre chez moi, pour pouvoir être...Enfin, j'aime bien être seule, je ne me sens pas seule quand je suis seule, je me sens seule uniquement avec les autres. C'est dommage je trouve, à mon âge, de se sentir seule lorsqu'on est avec les autres et pas quant on est avec son écriture. Je trouve ça pénible. Avant, avec mes clients, ma famille, je me sentais pire que seule, je me sentais morte.

Mais grâce à elle, peut-être que ça va changer, je l'ignore encore. Je découvre des choses nouvelles. Des étoiles se sont éteintes. Elles passent leur temps à exploser, ce sont de vraies salopes.

Et là, elle dort. J'espère qu'elle ne sera pas fâchée demain que je ne sois pas restée pour toute la nuit. Je l'aime moi cette fille.

murphy21

ANGELINE

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