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Les Récits de la Maison des Morts
Les Récits de la Maison des Morts
17 janvier 2008

Les Choeurs de Mexico

tarantino460

TROMPER. LEURRER. TERRORISER. SAUVER.

Je ne suis pas tombé dans ton piège. Je ne suis pas impressionné par les ongles vernis, par les cheveux longs, les talons hauts, la gestuelle d'une femelle. Elle n’est pas excessive chez toi, elle est importante, et on la voit. On fait la différence entre toi et un mec quand même. Sauf sur ces photos, tu as dix-huit ans et tu es sinistre physiquement, tu te caches dans le regard que tu as adressé à l'objectif. A moins de loucher sinon, on voit la différence. Nue c’est encore plus frappant forcément et de cela je m’en réjouis. Forrest Gump ne te fait plus pleurer, et c’est tant mieux parce qu’il ne passe pas l’épreuve du temps ce mélodrame teinté d’humour. Typiquement américain. J’en connais un rayon à présent. Ton mari, pardon, l’homme qui aurait dû être ton mari depuis longtemps déjà, il en connaît un sacré rayon aussi. Tu ne le savais pas ? Petite salope, ma petite conne (avec amour). Et bien maintenant tu le sais. Tu n’avanceras plus dans cette ignorance qui te faisait tant de bien autrefois. Tu t’en souviens encore. Tu t’en souviens encore comme si tu avais les mains pleines de plumes. Le corps du gros poulet est mort, ils lui ont coupé la tête, le corps a continué de courir partout. La tête coupée. Pas comme ces pauvres infirmières. Tu as bien fait d’arrêter de faire des piqûres j’ai envie de te dire ma salope. Tu n’aimes pas qu’on te maltraite, ce n’est pas de violence à ton égard qu’il s’agit dans ma gorge. Je n’ai pas envie de te maltraiter. Je l'ai déjà fait de mon vivant et je le paie à présent. Crois-moi. On paye tous, ici. On paye tous partout, oui c'est vrai tu as raison. Mais tu ne vois pas tout ce que je vois. Je n’ai pas envie d’avoir envie de te faire du mal, on aurait presque envie parfois, d’avoir envie. De te faire du mal. Toutes celles qui sont comme toi, qui ne sont pas uniques. Tu sais, elles sont heureuses, en faisant les boutiques, les soldes, elles rêvent qu’elles tombent amoureuses d’un homme charmant, doux et sensible, mais au final elles deviendront avocates, feront l’amour avec des hommes politiques mariés depuis longtemps et finiront par vieillir seules et tristes. Je ne vois pas un destin comme celui-là pour toi, c’est dommage, tu le mérites pourtant. Tu le mériterais bien, ce destin-là. Ce destin de garce. Uniquement réservé pour les garces dans ton style qui font leur retour d’âge à vingt-six ans. La honte. Tu n’avanceras plus dans cette ignorance qui te faisait tant de bien autrefois. Tu n’avanceras plus du tout dans rien. J’ai envie de te dire. Mais comme ce serait faux, je pense que je me dois d’allumer une cigarette, rien d’autre. Et te regarder. Dormir, baiser, manger, penser ; on voit les pensées, vu d’en haut. J’aimerais te dire que je suis là, toujours là, pour te surveiller, beaucoup de gens croient plus en leur guide qu’en leur Dieu. Beaucoup de gens, beaucoup de gens, un terme de ton acabit, qui ne veut rien dire. Tu ne veux rien dire. Mais là encore, je sais que je suis dans l’erreur, je la provoque volontairement. Tu dors et je vois tes rêves. Parfois je t’envoie les miens, pour faire balance. Tu sais, deux poids deux mesures comme disait Dieudonné, à l’époque où il utilisait ce terme, pour se faire entendre, pour se faire comprendre. Les caresses de ton homme me dégoûtent ou m’impressionnent. Tout est si clair. Tout est si précis. Tout se sait, mais se sait sans savoir pourquoi, c’est comme en bas, on ne se réveille pas, et ça fait mal. Quelque part. Mais la douleur elle-même n’est qu’apocalypse, ça n’a pas beaucoup d’incidence finalement, la douleur. Tu avais une amie qui te disait : n’oublie pas que la douleur n’existe pas, ce n’est qu’une illusion. Tu lui répondais : non, elle existe (et pourtant elle tourne). La Terre. Notre Terre, si belle. Ce n’est qu’une illusion et pourtant elle tourne, donc non, la douleur existe. Existe, la souffrance. Souffrir d’être soi combien en sont encore là ? Et combien de temps encore des déchets viendront te parler d'eux alors qu'ils ne t'intéressent pas ? Franchement, quelle importance pour toi de voir un mec venir te dire qu’il fait une rétrospective de l’année écoulée à ses amis, et qu’il donne son sentiment sur celle qui vient ? Je m'en fous, tu t'es dit. Quelle importance pour toi ? Aucune. Quelle importance de l’entendre écrire qu’il ne se trompe jamais ? Avant cet enculé il venait te parler, dans ses commentaires de petit joueur vaguement concerné, il venait te parler comme si tu étais sa serpillière. Et là il commence par Mademoiselle, tu as pensé, j’ai vu ta pensée sur l’instant, en ouvrant son message : quelle ineptie il va encore débiter ? Le pauvre, il cherche toujours à se donner une supériorité lorsqu'il m'écrit, comme s'il avait besoin de ça pour me dire quelque chose, on dirait qu'il n'est pas à l'aise dans ses baskets, dans sa vie pour faire ça. Comme ça, mon Ange, tu devrais aimer cette cuisine, qu'il prépare, elle vient de l'Amérique pas du Mexique, on ne fait pas des hommes avec des soupes préhistoriques, pas comme ça d'un coup non. Ce n'est pas si rapide, il y a des étapes, des niveaux,  entre les deux, entre la soupe et l'homme. Car l’autre cuisinait, des recettes rapportées d'Amérique. Pas du Mexique. Si tu prends en compte tous les gens qui vivent au Mexique, et notamment à Mexico, seulement les gens qui vivent à Mexico, alors tu peux te rendre compte pourquoi l'autre cuisinait dans la cuisine pendant que tu étais ailleurs, les pieds sur Terre mais la tête dans les étoiles. Comme le prétend Francis, qui dans sa mauvaise foi habituelle (sans compter la tienne) sait mieux que tout le monde lorsqu'il surfe comme un grand sur le net. Son narcissisme il serait temps qu'il l'abandonne pendant quelques temps pour voir sur quoi il pourrait déboucher. Les geeks ont la dent dure, et l'amour a perdu un peu de son aventure, vous faites comme vous le pouvez, en bas, je suis content de n'être plus là pour voir ça. Même si je suis encore là pour voir ça, mais à un autre niveau, ça fonctionne par niveau, comme dans la vie, comme dans la société. Tu as d'abord les prostituées, qui sont vraiment de la merde de chez merdasse. Ensuite les sans-abri (les clochards quoi). Ensuite les enfants, ensuite les animaux, ensuite les ouvriers, ensuite les vedettes, ensuite les médecins, ensuite les militaires, ensuite ensuite ensuite... Laisse tomber. Ici je peux écouter Charles Trenet me parler des hommes avant qu'ils ne grandissent et je peux aimer sa musique dans un même temps. J'avais beaucoup de fantasmes à ce niveau-là, tu t'en souviens parfaitement lors de ton épique mariage, tu étais trop jeune, trop fébrile, tu étais un pont en train de s'écrouler, et moi je sautais sur toi pour que la chose s'écroule plus vite, avec moins de douleur aussi... Un petit coup de rouge, tu vois, de temps en temps, deux, trois, trente-six bouteilles par jour, plus tous les autres extras en cachette. Tu vois. C'est bizarre mais ça ne me manque pas. Je crois que je suis pardonné ici. Tu vois. Je suis pardonné de mes péchés. Chose qu'on ne peut arriver à gagner en étant mortel. Le corps empêche le pardon total. Je ne sais pas si tu comprends ce que je veux te dire. Donne-toi corps et âme à quelque chose de juste et tu verras qu'on finira par te tuer. La mort donne les véritables absolutions, ce n'est pas joli, ce n'est pas agréable mais c'est comme ça. Le but n'est pas la chair. Le passage, tu vois, d'en haut, je ne plane pas comme toi il y a quelques jours, le passage est important pour des raisons qui m'échappe encore, je ne sais pas combien de temps s'est écoulé depuis ma mort (un an et presque deux mois - note d'Angeline). Si loin et si court en même temps. Je te vois te brosser les cheveux, te brosser les dents, avec lui, cet homme-là, je sais qu'il a de la chance, je connais aussi sa malchance (les morts ne connaissent rien - note d'Angeline). D'ailleurs tu diras à ton ami qu'il se trompe lorsqu'il croit que tu parles des morts comme des vivants, tu lui diras qu'il se fourre le doigt dans l'oeil, dit-lui : dans son oeil de verre, il comprendra. Tu sais, ton ami. Celui au bureau de verre dans la Tour de Verre. Tu sais. Mais si. Un ami de celui qui cuisine. L'oeil de verre. Il te parlait de l'écriture pour t'amadouer. Si tu ne comprends pas ce que je suis en train de te raconter, ce n'est pas important, il faut juste que tu lui écrives ça. Pour qu'il entende cette phrase. C'est important. Pas pour toi encore, je le rappelle. Il n'y a pas que toi dans la vie. Ma douce, ma belle. Je ne suis pas tombé dans ton piège puisque j'ai essayé de te tendre le mien. Tu n'étais pas le genre à créer des pièges, même dans ton écriture. J'ai parfois de la tendresse à ton égard. J'aimais bien montrer Belle & Sébastien aux enfants de mon ex-femme. Les enfants, je les désirais trop, c'était trop, trop, trop fort. Trop. Oui j'a parfois de la tendresse à ton égard mais je n'ai pas le droit de te guider, je peux juste t'envoyer mon amour. Tu sais comme nous autres en haut nous sommes pleins d'amour, et que vous, en bas, vous êtes surtout pleins de merde. Vous nous enviez ça. Vous nous en voulez aussi. L'amour est aveugle. Enfin ça dépend du coeur qu'il habite. Vous souffrez de moins en moins pour ça, vous êtes de plus en plus en train de regarder vos nombrils, à cause de vos erreurs, c'est obligé. Il faut repenser les odes, repenser les saisons. Revoir à la hausse le prix du pétrole (encore). Je suis heureux de t'avoir retrouvée dans cette vie, la dernière fois ce fût bref. Tu étais un homme la dernière fois et moi une femme. Et tu étais artiste, dans la danse. Tu dansais et tu avais la rage au coeur, comme dans cette vie présente. Je sais que tu ne m'entends pas, marteler toutes ces choses, j'essaie de les faire entrer dans ta tête, pour que tu puisses les écrire par la suite, même détournée, même en signant, du style, le narrateur c'est lui, c'est un mort, un mort qui est mort de sa belle mort, à l'époque où il était vivant il ne souhaitait déjà qu'une seule et unique chose : mourir. Etre mort. Dans le fond. Le foie a souffert. Je me suis remariée à cette connasse, mais j'ai bien fait de la quitter pour mourir très vite ensuite. Quand je pense que tu étais venue à notre mariage fagotée en homme, j'étais surpris qu'en Bretagne, certains aient trouvé ton choix original et bien choisi. Non mais qu'est-ce que j'ai pas pu entendre. Et puis ma femme qui pensait qu'il s'agissait d'une vengeance. Et toi qui était si belle, si innocente, pas dans le sens du vide dans le sens de cette grande sagesse que tu imposes, silencieuse, forte, douce, chaleureuse, embaumante comme les odeurs aux toilettes, ou comme les produits d'embaumement pour les morts (les vrais morts). Il faut préciser, Angeline, il y a des chagrins qui se chagrinent trop. Quand tu parles par métaphore. Les morts. Ou pas. Il confond le petit là. Denis frappe mal avec son marteau, peut-être même qu'il se blesse, malgré sa grande dextérité. Il voulait absolument accrocher cette peinture de Nouillorc sur ce mur. Oublie tous les autres hommes, celui qui te cuisine quelque chose, ils te parlent avec le coeur, avec les tripes, et avec le produit de ses tripes, la semence. C'est clair comme de l'eau de roche, c'est limpide comme une révélation de Jean lue au petit matin d'un 11 septembre (je sais ma belle que là, tu ne me suivrais pas. Mais tu devrais te réveiller, je te le conseille vivement. Très vite. Et ne me dit pas que je parle comme un Témoin de Jéhovah, Angeline, de mon vivant tu savais que je les détestais bien plus que toi, toi qui ne déteste pas les Dieux des autres). Sauf peut-être le mien. Il t'aime et moi ça me met mal à l'aise, notamment à cause de ce que je peux voir de votre avenir. Tu n'as pas d'avenir avec cet homme. Que de souffrance, que de sang, que de violence, je ne vois que ça de là où je suis placé. Tu rejoueras tôt ou tard ton schéma d'abusée. Tôt ou tard, c'est une question de temps. Tu n'es pas obligée de me croire. Tu n'es obligée de rien. On met la pédale douce sur les effets d'annonce, l'horreur attend son heure, tu n'es pas celle à qui je dois le rappeler. Tout de même. Tu es si belle, si belle lorsque tu le baises. Sache que ces moments, même ceux-là ne vous appartiennent pas. Sache que rien n'appartient aux mortels, ils ne s'appartiennent déjà pas à eux-mêmes et passent leur vie à penser le contraire. Mais une fois morts, ils déchantent rapidement ceux-là. Tout ce qui traîne de néfaste si tu savais, mais un jour tu sauras. Parce que c'est chacun son tour, dans cette cour, c'est chacun son tour, et ça peut très bien être le tiens demain. Tu le sais très bien. Vous le savez très bien. Mais vous faites comme si, parce qu'on ne peut pas vivre dans l'horreur, car la mort c'est l'horreur absolue. C'est très différent une fois passé le cap. Et ça ne fait pas mal, dans l'instant, quand ta lumière, ton souffle est repris de ta pauvre carcasse mortelle. Tu te sens plus léger et tu vois mieux les choses pour peu que tu t'y attardes. Il cuisine pour toi, son coeur bat, c'est une sorte de miracle, et Dieu n'a rien à voir là-dedans. Pas plus que les Choeurs du monde entier, ou ceux qu'on trouve à  Mexico lors, par exemple, d'éclipses.    

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